Exercices pour la clef 16C

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exercice 1

Le texte qui suit a été écrit quelque temps après que la Justice américaine, représentée par le procureur Joel Klein, eut remporté un procès intenté à Microsoft en vertu de la loi sur les monopoles.

Textes de base pour l'exercice
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Un voyou en cache deux autres

Imaginez ce que ressentent en ce moment Joel Klein [procureur général adjoint, responsable du département antitrust] et le reste de sa bande au ministère de sa Justice. Ils ont gagné, Microsoft a perdu: l'affaire est terminée. Et maintenant, quoi d'autre? Pour sûr, c'est le pied de se balader à Washington par un beau mardi ensoleillé et de profiter des cerisiers en fleur pendant que les autres en bavent devant les écrans d'ordinateur, mais, au bout d'un moment, l'ennui s'installe. Alors, Joel, fie-toi à mon expérience: le meilleur moyen de conjurer cette impression de vacuité, c'est de te lancer à corps perdu dans un nouveau projet. Tu as besoin de te diversifier. Alors, pour le plus grand bénéfice des consommateurs américains, voici quelques suggestions.

America Online (AOL)

Pourquoi a-t-on laissé de tels clowns devenir aussi puissants? Au début, on utilisait America Online (AOL) pour envoyer des messages cochons à des mecs en se faisant passer pour des femmes au foyer en mal d'aventures. Aujourd'hui, il fait la une de Time. Mieux que ça, il est propriétaire de Time. Et alors? Eh bien, voilà. AOL soumet ses usagers à une surveillance systématique et il censure des pages pour des propos jugés "contestables". Il a menacé de poursuites judiciaires les propriétaires de sites qui critiquaient son service. Il a été contrôlé et poursuivi pour pratiques douteuses de facturation. Il s'enorgueillit d'avoir pour directeur l'ultraconservateur Alexander Haig, le copain de Nixon et de Reagan.

Et surtout, ces cinq dernières années, AOL a été l'une des entreprises les plus insatiables du secteur informatique. Personne n'a fait gaffe quand il a avalé ses principaux concurrents, les autres spécialistes du service en ligne. Microsoft a été le seul à protester quand AOL a mis le grappin sur ICQ, le logiciel de messagerie instantanée dernier cri, et sur ses 20 millions d'utilisateurs. Tout le monde est entré dans le jeu quand la firme de Steve Case a vaillamment sauvé Netscape d'une déconfiture imminente -- passons sur le fait qu'à la date où il le rachetait le potentiel d'usagers du Navigator de Netscape était infiniment plus élevé que celui de l'Internet Explorer de Microsoft.

À présent, AOL achète l'un des plus gros conglomérats de médias du monde, et personne ne moufte. Bien sûr, le reportage spécial de CNN/Time sur le fusions-acquisitions pourrait te tranquilliser, mais fais marcher tes méninges et imagine-toi dans cinq ans. Quand tu t'abonneras à un service de modem par câble, AOL sera ton fournisseur d'accès par défaut à peu près partout sur la côte Est. Les artistes de Warner Brothers seront singulièrement à l'honneur sur Spinner.com, le site musical d'AOL. Et, quand tu appelleras MovieFone, filiale d'AOL, tu devras ingurgiter une pub gnangnan pour la suite de Vous avez un message [film de Nora Ephron avec Tom Hanks et Meg Ryan, 1998], une production Warner. L'horreur!

Ticketmaster

J'avais presque oublié pourquoi je n'allais plus aux concerts dans les stades, jusqu'à ce que je me décide à prendre le taureau par les cornes en allant voir l'un de mes dinosaures du rock préférés. Imagine ma surprise quand j'ai découvert que le service de ce monopole infâme de billetterie de concerts, appartenant à USA Networks, était encore pire que le souvenir qui m'en restait. En plus des messages "occupé", des 15 à 20 % de facturation du service et des frais de dossier totalement non remboursables, il est pratiquement impossible d'être mis en relation avec un être humain. En revanche, tu as droit à une voix de robot -- style Stephen Hawking -- qui te récite des chiffres inaudibles sans aucun rapport avec le listing des places. Si tu as le courage de poireauter une demi-heure pour parler à une vraie opératrice, tu passes les deux tiers de la conversation à refuser les offres spéciales. Non, je ne souhaite pas être inondé d'e-mails publicitaires hebdomadaires. Pourquoi demandez-vous ça? En vertu de la législation antitrust, le sénateur de l'État de Californie John Burton (démocrate, San Francisco) a essayé plusieurs fois d'intenter une action en justice contre BASS, la filiale de TicketMaster dans la Bay Area, mais il n'a jamais pu obtenir un soutien suffisant du gouvernement pour contrer les habiles collaborateurs juridiques de cette entreprise. Alors, à quand une enquête fédérale?

Souviens-toi, Joel, la législation antitrust n'a pas été adoptée seulement pour que de vilains milliardaires à lunettes ne s'offrent pas plus d'une résidence sur le front de mer: elle est censée nous protéger contre les pratiques commerciales qui assaillent le consommateur au mépris des règles de la concurrence. Peu m'importe le montant du compte en banque de Steve Case ou de Barry Diller, patron d'USA Networks. Je veux seulement pouvoir éviter leurs sociétés tant qu'elles ne proposent pas un service convenable.

Article de Matt Rosoff, paru dans le SEATTLE WEEKLY et tel que reproduit et traduit dans le COURRIER INTERNATIONAL (http://www.courrierinternational.comlien externe), numéro 499, le 25 mai 2000.

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© Victor Thibaudeau, mai 2008