Exercices pour la clef 9B

Voir l’information détaillée pour cette clef

exercice 1

Le texte utilisé pour cet exercice porte sur la réaction suscitée dans la communauté scientifique, face à l'attitude du gouvernement de George Bush au sujet des questions environnementales. L'accord de Kyoto, entente internationale suivant laquelle plusieurs pays s'engageaient à diminuer leurs émissions de gaz à effet de serre, y occupe la première place. George Bush, dirigeant du plus puissant État du monde, a décidé de retirer l'appui de son pays pour le respect de cet accord.

1- Avant de lire le texte en question, considérez les idées suivantes. Chacune d'elles a été développé en réaction face à certaines autres présentes dans le texte que vous lirez.
  1. Quand il fut conclu, l'accord de Kyoto fut, de fait, vertement critiqué par plusieurs scientifiques et écologistes, qui le jugèrent futile et inefficace.
  2. L'immense majorité des pays qui soutiennent l'accord de Kyoto n'ont encore rien fait pour l'appliquer et rien ne laisse croire que les choses changeront. (Le Canada, par exemple, fut un des premiers pays à se dire d'accord avec le traité, mais ses émissions de gaz à effet de serre, proportionnellement aussi grandes sinon plus que celles des États-Unis, continuent d'augmenter.) Les raisons de cette non-application peuvent être diverses: paresse, craintes face aux coûts, hypocrisie, etc.
  3. Que vaut un tel traité si les deux pays les plus populeux de la planète, la Chine et l'Inde, refusent de le signer? Comment penser que les concurrents commerciaux de la Chine -- ce qui est loin d'être seulement les Américains -- accepteront d'appliquer des règles environnementales plus strictes et plus coûteuses et de laisser la Chine avoir une meilleure productivité?
  4. Il existe des scientifiques sérieux, et pas seulement des gens qu'on peut tout de suite qualifier d'idiots à la solde des pétrolières, pour penser qu'à montants égaux il est environnementalement plus payants de dépenser pour planter des arbres que pour émettre moins de gaz à effet de serre.
  5. Les Américains ne sont que 5% de la population mondiale, mais ils jouent un rôle à l'échelle planétaire que personne d'autre ne joue: présence militaire et maintien de la stabilité mondiale, invention et production de technologies ensuite utilisées par tous les autres pays, etc. On ne peut pas, en toute justice, leur attribuer un "pourcentage de pollution" acceptable uniquement en fonction de leur nombre. Aucune industrie nationale ne joue un rôle à l'échelle internationale comme le fait celle des États-Unis.
2- Lisez maintenant le texte, et demandez-vous si les idées précédentes y sont évoquées par l'auteur à quelque endroit.

Vous trouverez un commentaire à ce sujet à la suite du texte.


Texte de base pour l'exercice

Version imprimable du texte

Bush et la science: il y a moyen de faire mieux, George

Il n'arrive pas souvent que les scientifiques se mobilisent contre un politicien. C'est arrivé l'an dernier, lorsque le président sud-africain s'est mis à contester le lien entre le virus VIH et le sida. Mais cette fois, la communauté scientifique s'attaque à un plus gros morceau: le président des États-Unis, George Bush lui-même.

Certes, la décision du président Bush de poignarder l'accord international de Kyoto, sur la réduction des gaz à effet de serre, a provoqué la colère de tout ce qui bouge dans les milieux écologistes de la planète. Mais cette décision a fait tellement de bruit qu'on en a oublié qu'elle n'est pas arrivée seule: la semaine dernière, à peu près au même moment, l'Agence américaine de protection de l'environnement annonçait qu'elle s'apprêtait à enterrer une décision antérieure, visant à diminuer le taux d'arsenic autorisé dans l'eau potable. Motif: ça coûterait trop cher. Toujours pendant ce temps, le dossier de la prospection pétrolière dans une réserve protégée de l'Alaska poursuivait son petit bonhomme de chemin, en dépit des protestations. Le tout s'ajoutant aux reculs, hésitations et tergiversations depuis l'entrée de Bush à la Maison-Blanche, sur une foule de dossiers environnementaux approuvés par son prédécesseur, Bill Clinton.

Résultat : la décision, annoncée le 28 mars, de ne pas ratifier Kyoto, n'a pas seulement provoqué la colère d'une poignée de ministres de l'environnement et des écologistes: elle a suscité un éditorial dans la très réservée -- d'ordinaire-- revue Nature. "Des décisions précipitées sur les niveaux d'arsenic et les émissions de dioxyde de carbone indiquent que l'opinion des scientifiques figure très bas dans l'ordre des priorités de la nouvelle administration Bush." Normalement, lit-on plus loin, il faut des semaines à un nouveau gouvernement là-bas, pour s'ajuster, trouver sa note, écouter les avis divergents des nouveaux conseillers et des divers lobbyistes. Cette fois, il a suffi de quelques semaines pour rendre claire, limpide même, la position de l'administration Bush sur ces questions où, normalement, l'avis des scientifiques aurait joué un rôle important. Cette position "se situe fermement du côté des employeurs et des pollueurs qui ont contribué à payer à l'élection singulièrement peu impressionnante de Bush en novembre dernier." Et vlan.

On pourrait toujours dire de Nature qu'elle est une revue britannique, et qu'en conséquence il est plus facile pour elle de critiquer les Américains. L'autre prestigieuse revue scientifique, Science, elle, bien qu'américaine, n'est guère plus tendre dans son propre éditorial: elle commence par rappeler que, pendant la campagne électorale, Bush s'était engagé à réglementer les émissions industrielles de dioxyde de carbone -- ce qui, est-il besoin de le rappeler, constitue le coeur même de l'Accord de Kyoto, signé en 1997. Elle poursuit en rappelant qu'à elle seule, Science a publié au cours de la dernière année plus d'une trentaine d'études étoffées sur la réalité du réchauffement planétaire et son impact prévisible -- sur les cultures, les animaux, les glaciers, etc. "Et ceci ne vaut que pour une seule publication." Pareil consensus est rare en science.

"Nous avions été portés à croire que le président était prêt à prendre la route constructive qu'il avait indiqué pendant sa campagne..." Malheureusement, il n'y avait manifestement aucun scientifique autour du président pour lui dire qu'il se fourvoyait en changeant d'idée.

Dans le cas des taux d'arsenic dans l'eau, une importante étude de l'Académie nationale des sciences avait clairement conclu à la nécessité d'une réduction. La Maison-Blanche a préféré l'opinion de l'industrie. Et dans le cas de la réduction des gaz à effet de serre, il n'est pas nécessaire de revenir sur la montagne d'études concluant systématiquement à un réchauffement accru de la planète causé par les humains. La Maison-Blanche et le Congrès ont préféré l'opinion de l'industrie, qui a donné pour prétexte la crise de l'énergie en Californie. "Nous, Californiens, s'indigne l'éditorialiste de la semaine dans Science, sommes utilisés comme excuse pour un autre virage malheureux!"

Avec 5% de la population mondiale, mais 25% des émissions mondiales de gaz à effet de serre, les Américains sont considérés comme les premiers pollueurs de la planète. L'accord de Kyoto, négocié péniblement par une centaine de pays, exige que 38 pays industrialisés (excluant l'Inde et la Chine) réduisent, d'ici 2012, leurs émissions au-dessous du niveau de 1990. Pas les éliminer: juste les réduire. Une réduction équivalant en moyenne à 5,2% du total des émissions actuelles, et à 7% aux États-Unis. Ce qui est fort peu aux yeux des écologistes, mais déjà, avait nécessité de longues séances de tordages de bras, il y a trois ans. Et rien que ça constitue pourtant une dépense inacceptable aux yeux de plusieurs chefs d'industries.

En Europe, où l'accord de Kyoto avait été lu et approuvé, on s'est indigné toute la semaine. "Le montant de la facture d'électricité des Américains passe avant l'avenir de la planète ", a-t-on pu lire sous différentes formes. L'Allemagne, la France, la Grande-Bretagne, par la voix de leurs parlements, leurs ministres de l'Environnement ou leurs journaux, ont protesté de façon virulente -- souvent de façon bien plus virulente que ce à quoi Washington a été habitué, relate le New York Times. Le Canada et le Japon, alliés naturels, sont à peu près les seuls à avoir mollement protesté après la décision Bush.

"Si quelqu'un veut être un dirigeant du monde, il doit apprendre à regarder la Terre entière, et non pas seulement l'industrie américaine", a déclaré à un journal italien le premier ministre italien. La Suède, qui assure la présidence de l'Union européenne, assure que l'Europe continuera, elle, de soutenir Kyoto. Mais sans l'accord des États-Unis, l'Accord de Kyoto pourrait ne valoir guère plus que le papier sur lequel il est écrit. Enfin, pour couronner le tout, selon le Washington Post, la Maison-Blanche aurait demandé un avis d'experts sur la façon dont elle pourrait légalement se désengager de ce traité...

L'Union européenne, il est vrai, n'est pas blanche comme neige. Elle n'a pas encore ratifié le traité: elle ne devait le faire qu'en 2002. À ce jour, à peu près seuls des pays du Tiers-Monde l'ont ratifié, souligne Libération. Qu'on se rappelle ces discussions, l'automne dernier à la Conférence de La Haye, sur les "pièges à carbone", ces forêts que d'aucuns se proposaient de planter, pour remplacer les réductions de leurs émissions industrielles de gaz polluants -- puisque les arbres, c'est bien connu, absorbent le carbone...

L'univers texan de George Bush, c'est celui des firmes pétrolières. Ses alliés naturels, ce sont les présidents des compagnies de pétrole, du charbon, du gaz. Rarement cela aura-t-il été aussi évident pour un président américain que pour celui-ci...

Article anonyme tiré du site WEB de l'Agence Science-Presse (http://www.sciencepresse.qc.calien externe), manchette de la semaine du 3 avril 2001.

Pour voir le commentaire de la question No 2, cliquez ici.

La plupart des gens ressortiront de cette lecture absolument convaincus du fait que Bush et son gouvernement ont tort de cesser d'appuyer l'accord Kyoto. Mais est-ce seulement parce que les arguments de l'auteur sont si convaincants?

L'auteur présente effectivement la situation de façon convaincante, en usant principalement d'arguments basés sur des autorités crédibles (Nature, Science, etc.) et de statistiques frappantes (5% de la population mondiale qui produit 25% des gaz à effet de serre, etc.). Mais pouvons-nous sérieusement nous faire une opinion sur les arguments contre l'adoption de l'accord de Kyoto? L'auteur ne les présente à peu près pas et se contente la plupart du temps de dire que le gouvernement Bush est à la solde des grandes pétrolières. Il y a pourtant moyen -- des gens très sérieux l'ont fait -- d'argumenter contre les idées de l'auteur de l'article.

Pour faire une présentation plus équilibrée du problème ou tout simplement pour laisser le lecteur juger par lui-même qui a tort ou raison, l'auteur aurait dû ne pas tant négliger les positions contraires et ce sur quoi elles s'appuient. Il aurait dû les évoquer et à tout le moins, les réfuter brièvement.

3- Inspirez-vous des quelques idées présentées en introduction (ou d'autres du même genre, si vous en avez), et réécrivez ce texte de façon à ce qu'on ne puisse plus lui reprocher de négliger les positions et surtout les arguments contraires.

Pour que le texte conserve son unité tout en évitant les reproches qu'on peut lui adresser, il faudrait inclure un ou des arguments contre en leur ajoutant une réfutation. Il s'agit d'un moyen très efficace pour contrer la critique: anticiper quelles raisons des opposants pourraient avancer à l'appui de leur thèse et invalider leur position en donnant une meilleure raison contre la leur.

Haut de page

© Victor Thibaudeau, mai 2008