De la philosophie à la poésie: Hélène Dorion revient sur son parcours à l’Université Laval
16 octobre 2025
À l’occasion du 90e anniversaire de la Faculté de philosophie de l’Université Laval, la poète, essayiste et romancière Hélène Dorion était de retour là où tout a commencé. Invitée par le doyen Pierre-Olivier Méthot, elle a pris part à un entretien empreint d’émotion et de réflexion, devant un public réunissant professeurs, étudiants, diplômés et admirateurs.
La rencontre s’est ouverte sur une allocution du professeur de littérature Michaël Trahan, qui a salué l’ampleur et la profondeur de l’œuvre d’Hélène Dorion, soulignant son enracinement dans la pensée philosophique. Il a décrit une écrivaine d’une grande générosité, dont les mots inspirent à leur tour le désir d’écrire.
Un retour aux sources
Pour animer la discussion, Pierre-Olivier Méthot a retracé les années d’études de l’écrivaine dans les corridors de l’ancienne Tour des arts, aujourd’hui pavillon Félix-Antoine-Savard. Grâce aux archives de Bibliothèques et Archives Canada, il a présenté des lettres, des notes de cours et des poèmes publiés dans des revues étudiantes, ravivant chez Hélène Dorion des souvenirs intenses et touchants.
Une œuvre saluée à l’international
L’entretien a aussi permis de mettre en lumière la reconnaissance internationale dont bénéficie Hélène Dorion. Lauréate du Grand prix de poésie de l’Académie française, elle est également Chevalière de l’Ordre des arts et des lettres et de l’ordre de la Pléiade. Son recueil Mes forêts (2021) est désormais inscrit au programme du baccalauréat de français, une épreuve qui marque la fin des études secondaires en France.
Pour l’autrice, cette œuvre est bien plus qu’un succès littéraire: elle incarne un lien profond avec la nature, qu’elle considère comme une véritable interlocutrice philosophique. Mes forêts est aussi un acte de transmission, une porte ouverte vers les jeunes lecteurs, à qui elle souhaite offrir la poésie comme une compagne de vie.
Une vocation née à l’Université Laval
Le doyen a partagé avec le public une lettre écrite par Hélène Dorion à l’âge de 19 ans, dans laquelle elle expliquait les raisons de son choix d’étudier la philosophie, malgré les attentes familiales orientées vers le droit. Ce choix est rapidement devenu une vocation, nourrie par une curiosité intellectuelle et une quête de sens.
Inscrite à la Faculté de philosophie en 1977, elle s’est impliquée activement dans la vie étudiante, notamment au sein de revues et d’associations facultaires. Elle décrit ses années d’études comme un « buffet de connaissances », où elle a pu explorer librement l’épistémologie, l’éthique, l’esthétique, et les grands penseurs, tels que Platon, Nietzsche et Sartre.
Deux notions clés ont marqué cette période : le questionnement et l’émerveillement. Ces portes d’entrée vers le monde continuent d’habiter son œuvre littéraire.
Une fidélité à la pensée
«J’ai quitté la philosophie comme on quitte un amour; en ayant la certitude de pouvoir la revivre ailleurs, sous d’autres formes», confie-t-elle dans son mémoire de maîtrise Hors champ (1985). Loin d’un renoncement, ce départ marque une transformation : la philosophie vit dans sa poésie, et sa poésie, dans la philosophie.
Les archives présentées ont révélé une continuité thématique dans son œuvre: la résolution des contraires, le corps et l’esprit, la nature, les origines, la création. Influencée par Nietzsche et Camus, elle a trouvé dans la poésie un espace pour exprimer ce que la raison ne pouvait contenir : l’émotion, le chaos, le désir.
«La raison limitait la vie, l’être humain. Elle ne le reflétait pas dans toute sa globalité», affirme-t-elle.
Une rencontre marquante
À la fois nostalgique et instructif, l’entretien a permis à Hélène Dorion de revisiter les lieux et les visages qui ont façonné sa jeunesse, tout en partageant avec le public les fondements de sa pensée et de sa sensibilité littéraire.
Sa voix douce, sa manière simple et lumineuse de dire l’essentiel ont laissé une impression durable. Chaque phrase semblait pouvoir devenir une citation, une leçon de vie. Un rappel que penser et écrire, c’est aussi une manière d’habiter le monde.
La soirée s’est conclue par une séance de dédicaces, au cours de laquelle l’écrivaine a échangé avec les participantes et participants, prolongeant le dialogue amorcé, dans une atmosphère chaleureuse et de proximité.
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